je viens de decouvrir un article sur la chéloniomancie.
La chéloniomancie ou comment prédire l`avenir par les écailles de tortues* ou...l`invention des caractères chinois...
Il ne s`agit pas ici de prédire l`avenir avec les feuilles de thé restant dans le fond de votre tasse ou de vous tirer au tarot. Il s`agit plutôt d`une méthode utilisée par les devins chinois il y a plus de quatre mille ans afin de prévoir l`avenir de leur empereur. En effet, cette pratique utilisée par les Yin à la fin du IIème millénaire av. J-C., représente les fondements de la littérature chinoise. Bon, d`accord, mais pourquoi une tortue?!?! Tout simplement parce que la tortue représente le cosmos en modèle réduit, avec, au-dessus, sa carapace ronde comme le ciel et au-dessous, sa carapace plate comme la terre. De plus, son emploi est dû à sa capacité de longévité considérable, tout à l`image de la durée immense de l`univers.
Si vous jetez un coup d`oeil au graphique plus bas illustrant une carapace vue de l`extérieur et de l`intérieur, vous verrez une ligne centrale verticale appelée la route de mille Li, divisant la carapace en deux parties caractérisées comme étant le yang à droite et le yin à gauche. C`est en appliquant de la chaleur à l`aide d`un tison à brûler sur la surface de la carapace que les craquelures apparaissaient et révélaient ce que voulait bien prédire le devin...La principale règle imposait une orientation opposée aux craquelures divinatoires (bu) de la partie droite et de la partie gauche. Ces craquelures avaient la forme d`un T renversé sur la droite ou sur la gauche, la tête du T devant faire face à la route de mille Li. Concrètement, on inscrivait la même question des deux côtés de la route de mille Li, les deux côtés devant révéler la même réponse pour que celle-ci soit crédible...double vérification. Le côté droit représentait la réponse espérée et le côté gauche le sens redouté (voir figure 2). C`est en interprétant les signes formés par les craquelures qu`ils retranscrivaient de manière plus claire en colonnes parallèles à même l`écaille que les devins prenaient leur décision; décision qui allait influencer le futur de leur tribu.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Regardons maintenant la forme standard de la formule utilisée par les devins:
La formule oraculaire complète comportait cinq phases;
1- la préface (comportant la date et le nom de l`opérateur);
2- la proposition assignative (désignant le fait, l`acte ou l`accident assigné à la divination);
3- la proposition judicative (énonce le résultat de la divination, issue favorable ou défavorable de l`acte posé par hypothèse, dans le cas ou l`acte serait exécuté);
4- la vérification (qui constate le ou les phénomènes par quoi s`est vérifié le résultat de la divination);
5- la postface (donne le lieu des événements et leur date, selon le calendrier lunaire et de cycle lithurgique).
Exemple d`une formule oraculaire (authentique):
(partie de droite de l`écaille de tortue)
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]1- Au jour guichou (le dernier de la 5e décade du cycle de 60 jours), production de craquelures, Zheng a procédé à la divination (préface);
2-Entre ce jour et le jour dingsi (le 4e de la 6e décade) nous abattrons Zhou (une ethnie étrangère qui n`est pas celle de la future dynastie des Zhou (proposition assignative);
3- Le roi a pronostiqué en ces termes: au jour dingsi nous n`abattrons pas (Zhou).Au prochain jour jiazi (le 1er de la 1re décade du cycle suivant) nous l`abattrons (proposition judicative);
4- Un décade et un jour après, au jour guihai, Che n`a pas abattu (Zhou). A la minuit de ce soir-là, au jour jiazi (il l`) a effectivement abattu.(vérification);
5- (la formule ne comportait pas de postface).
Partie de gauche (abrégée)
1- Au jour guichou, production de craquelures. Zheng a procédé à la divination (préface);
2- Entre ce jour et le jour dingsi nous n`abattrons pas Zhou (proposition assignative);
(la proposition judicative et la vérification sont omises).
On voit ici que la partie de gauche et de droite n`étaient pas entièrement identiques, mais comportaient la même question de base.
Finalement, il est important d`ajouter que ces prédicateurs devinrent ainsi les inventeurs de l`écriture chinoise lorsqu`ils s`aperçurent un jour, on ne sait pas trop comment, que les signes qu`ils avaient l`habitude de manier pouvaient être lier aux mots monosyllabiques de leur langue et pouvaient ainsi servir à reproduire la parole.
* Tiré d`un texte de Léon Vandermeersch, Extrême-Orient - Extrême Occident II, 1989.